Incompatibilité de personnalités : ces collègues que nous ne choisissons pas
Publié le 22 septembre 2014Lundi matin, 8 h01, et vous ne pouvez déjà plus le sentir.
Je ne parle évidemment pas du vieux sandwich laissé sur le coin de votre bureau, mais plutôt de votre collègue. Nommons-le Paul pour le besoin de la cause.
Paul est un homme performant au travail. Il est gentil et professionnel. Son seul défaut? Vous ne pouvez être en sa présence sans ressentir l’envie de disparaitre ou de changer de pièce. Il a ce je-ne-sais-quoi qui vous irrite, vous dérange, vous « tire du jus ». Il parle trop fort, son attitude vous agace. Votre bonne conscience vous persécute déjà :
« Tu n’as pas honte de t’acharner sur ce pauvre Paul qui ne t’a rien fait de mal? »
Ce malaise est fort probablement le résultat de ce que nous nommons communément une incompatibilité de personnalités. Pas de rivalité ni de différend. Juste une impossibilité pour deux personnes de se côtoyer et d’exister ensemble.
Nous avons tous un Paul dans notre entourage. Qui sait, vous êtes peut-être sans le savoir le Paul d’un collègue!
Contrairement à la majorité des relations interpersonnelles que nous entretenons au cours de notre existence, celles que nous développons avec nos collègues, nous ne les choisissons pas. Par quelconque aptitude professionnelle, compétence ou choix de carrière que ce soit, nous nous retrouvons sous le même toit plus de 35 heures par semaine. À la loterie des collègues, ça arrive qu’on gagne le gros lot. Qu’on y trouve des amis, des mentors, des gens hyperinspirants qui nous poussent à nous dépasser. Mais, malheureusement, ce n’est pas toujours si rose.
Et si on mettait les mots sur ce « ça » qui vous irrite chez Paul?
« Un coup de foudre » négatif
Jean Garneau, psychologue renommé au Québec et spécialiste de la psychothérapie d’orientation humaniste, affirmait que les conflits de personnalités pouvaient être comparés, par leur intensité et leur développement instantané, à un coup de foudre négatif.
Autrement dit, votre premier feeling est souvent révélateur : en quelques secondes, au premier contact, vous savez à qui vous aurez affaire, et ça ne vous plait pas. Beaucoup moins romantique, n’est-ce pas?
« Le conflit de personnalités nait rapidement […]. Il correspond à un conflit psychique déjà présent chez le protagoniste (c’est-à-dire vous) et à la sensibilité accrue qui en découle.»
Autrement dit, les moindres faits et gestes de Paul vous tapent sur les nerfs, car vous les appréhendez. Vous connaissez déjà ses commentaires et ses réactions sur n’importe quel sujet autour de la table sur l’heure du diner.
Bien qu’au départ le conflit puisse être unilatéral ou à sens unique, comme l’affirme monsieur Garneau, il devient rapidement réciproque, car votre comportement irrite Paul, qui n’est pas aveugle et réalise rapidement que vous ne vous adressez pas à lui comme aux autres collègues.
Puis, de fil en aiguille, le conflit prend de l’ampleur, car il est évité. Parce que, naturellement, votre seuil de tolérance étant incroyablement réduit, vous tentez d’éviter Paul.
De lourdes conséquences
« Le conflit de personnalités consomme une énergie psychique considérable à cause des émotions qu’il nous force à garder sous contrôle. »
La principale conséquence liée à ce genre de conflit est qu’il vous draine de l’énergie négative, et pas uniquement au travail. En effet, bien malgré vous, cette friction vous hante jusqu’à la maison, là où la patience « usée à la corde », la veine du cou menaçant d’éclater, vous vous en prenez à votre chum, votre blonde, vos enfants, votre poisson rouge. Vous vous défoulez sans le vouloir sur le premier venu, votre self-control envolé, disparu.
Les conflits de personnalités peuvent également avoir de lourdes conséquences sur le rendement et la motivation d’un employé, pouvant même justifier son départ ou sa démission. Évidemment, il faut prendre les choses en main avant d’en arriver à cette solution drastique.
Comment gérer une telle incompatibilité de personnalités avec un collègue de travail?
Retenez qu’il ne faut pas laisser le conflit se détériorer. Voici quelques conseils à se remémorer en situation de crise :
1. Prendre conscience du conflit
La première étape est de prendre conscience du conflit, car s’il est nié, son intensité augmentera, puis la mésentente deviendra réciproque. Une dynamique tendue entre deux employés se ressent rapidement au sein de l’équipe de travail en général : les autres collègues viennent à avoir conscience du froid entre deux individus et en souffrent eux aussi, inconfortables.
2. Lâcher prise
Il s’agit probablement de l’étape la plus difficile. Sans fuir le problème, il faut tenter de relativiser les faits et de leur accorder moins d’importance. En y pensant constamment, vous alimentez votre esprit d’une énergie complètement futile. Vous êtes incompatibles, voilà tout. La différence n’a-t-elle pas quelques aspects positifs? Tentez de voir le bon en Paul et ce qu’il peut vous apporter de constructif au travail. Rappelez-vous, vous n’avez pas signé un contrat de mariage avec lui!
3. Prendre l’initiative
Une discussion s’impose. Après avoir réfléchi longuement et à tête reposée, tentez de mettre les mots sur ce qui vous irrite chez votre collègue. Attention! L’introspection est la meilleure façon de faire état d’une situation aussi complexe. Ne l’accusez surtout pas! Parlez en terme de « je ». Vous devez exprimer comment vous vous sentez, vous, dans ce conflit. Évidemment, les attaques personnelles ou tout autre reproche sont à proscrire. Dans le calme et le respect, faites part de vos émotions et de vos appréhensions à votre collègue. Prenez le temps de vous assoir avec lui et d’écouter ce qu’il a à vous dire. Avec tact et délicatesse, vous réussirez à vous exprimer.
Advenant le cas où tout moyen de communication serait impossible, vous devez absolument vous référer à un agent externe au conflit, une personne neutre qui pourra agir à titre de médiateur et rétablir l’ordre.
Une récente étude menée par LinkedIn (LinkedIn Study Reveals Work BFFs Make Us Happier at the Office – lien sortant) démontrait que les bonnes relations entre collègues au travail contribuaient à la productivité et à la motivation des employés. Pourquoi ne pas mettre de l’eau dans son vin?
Par Arianne Caron